Dans le souci d’examiner comment les dynamiques militarisées et violentes révèlent l’enchevêtrement entre la conservation et la géopolitique en analysant les répercussions émotionnelles de ces développements dans les récits des gardes du parc sur leur travail quotidien, Lisa TROGISH, chercheuse en science sociale à l’Université de Wageningen au Pays-Bas avait réalisé et publier en juin 2021 le travail intitulé « Géographies de la peur – la géopolitique quotidienne de la violence «verte» et de la militarisation dans la zone de conservation transfrontalière des Virungas ».
Après douze mois passé avec les gardes forestiers du Rwanda Development Board (RDB) au Rwanda et de l’Uganda Wildlife Authority (UWA) en Ouganda ; en participant au guidage touristique, à la surveillance des gorilles et aux patrouilles anti-braconnage, ainsi qu’à vivre avec des gardes forestiers dans différents avant-postes de patrouille, cette chercheuse est parvenu à examiner comment la peur fonctionne pour légitimer les modes de violence « verte », la militarisation et la ségrégation des trois parcs nationaux (Parc National des Virunga (PNVi) en RDC, du Parc National des Volcans (PNV) au Rwanda et du Parc National des Gorilles de MGAHINGA (MGNP) en Ouganda) qui étaient destinés à former la zone de conservation transfrontalière des Virunga (GVTC) entre la République démocratique du Congo, le Rwanda et l’Ouganda.
Pour l’auteur, dans la zone de conservation de Virunga, des agents des États Ougandais et Rwandais instrumentalisent les craintes des rangers pour justifier la militarisation de la frontière sous couvert de conservation des gorilles de montagne pour mettre en scène la forêt transfrontalière comme zone tampon militaire et rempart au « Congo » réputé servir interventions militaires transfrontalières dans le contexte du génocide au Rwanda et de ses conséquences.
A en croire toujours cet auteur, la compréhension par les gardes forestiers de leurs devoirs de conservation militaristes et violents, mobilisant leur sens des responsabilités et la nécessité de protéger à la fois le parc national et les frontières.
La ségrégation mentale et spatiale qui en résulte entre les trois parcs nationaux sape les tentatives de favoriser la collaboration transfrontalière pour institutionnaliser la Collaboration Transfrontalière du Grand Virunga, précise l’auteur.
L’auteur suggère qu’une recherche plus nuancée concernant le rôle des émotions au-delà de la peur dans les efforts de conservation contemporains pourrait bénéficier à la littérature critique sur la conservation.
Il conclut en préconisant que les discussions critiques sur les pratiques de conservation soit ancré dans les réalités émotionnelles de ceux qui ressentent et adoptent ces pratiques dans leur vie quotidienne.
Joël MUBAKE