Les plantes intégrés dans le régime alimentaire des gorilles contiendraient des principes curatifs permettrait aux grands singes de se maintenir en bonne santé. Ces plantes exploitées comme phytomédicaments par les communautés villageoises qui y ont accès pourraient permettre de comprendre pourquoi les grands singes se montreraient résistants à certains parasites et autres agents infectieux présents dans leur environnement.
C’est ce que nous renseigne une étude réalisée par Dalley-Divin Kambale Saa-Sita et publiée dans le Open Edition journal en octobre 2022.
Sur les 33 espèces de plantes consommées par les gorilles identifiées par l’auteur, les parties généralement ingérées sont les feuilles (58 %), les écorces (30 %), les fleurs (12 %), les fruits (6 %), les tiges (9 %), mais aussi des éléments moins habituels comme les rhizomes (3 %), ou les troncs de bois morts durs ou en décomposition (3 %).
Parmi ces espèces nous citons en termes de fréquence de consommation en pourcentage: Arungana alpina K. Schum(, Rubus kirunguensis Engl., Urera hypseulodendron (Hochst. Ex A. Rich.) Wedd, Gynura ruwenzoriensis, Basella alba L., Galiniera coffeoides, Mimulopsis excellens, Piper capense L.f ,Mikaniopsis sp., Mikania cordata (Burm.f.) B.L. Rob, Solenostenon thyrsifiorum (Lebrun et L. Touss.) Troupin, Xymalos monospora Bail, Englerina woodfordioides Balle, Pteridium centreli-fricanium (Hieron. Ex R.E. Freis) Alston, Dracaena afromontana, Triumfetta cordifolia A. Rich Bois mort, Myrica mildbraedii, Vernonia ampla, Psychotia palustris, Galium sp, Neouboutonia macrocalyse, Ipomoea involucrata, Carduus nyassanus, Begonia Meyeri Johannis, Ilex mitis, Gynura scandens, Rapanea meianophloeios, Pychnostachys goetzenii, Blotiella crénata, Macaranga mildbraedii, Acalypha sp, Cyathea manniana.
L’auteur précise que les plantes les plus consommées sont les jeunes pousses et les feuilles d’ Arundinaria alpina K. Schum., les fruits et les feuilles de Rubus kirunguensis Eng. et les feuilles de Urera hypseulodendron (Hochst. ex A. Rich.) Wedd.
En s’appuyant sur des observations directes de l’alimentation et de l’état sanitaire de gorilles de plaine de l’Est du Mont Tshiabirimu (République Démocratique du Congo), ainsi que sur une recherche ethno-pharmacologique réalisée auprès de la population locale de la tribu Nande du territoire de Lubero et celle de la ville de Butembo, dans la province du Nord-Kivu, l’auteur découvre que Plusieurs parties de plantes consommées et intégrées dans le régime alimentaire des gorilles de montagnes sont aussi utilisées en pharmacopée locale et ont des propriétés bioactives connues en littérature scientifique.
Ceci constituerait donc une sorte de stock pharmaceutique interne, quotidiennement renouvelé par l’ingestion des plantes ayant des propriétés actives, permettant probablement de développer une certaine résistance aux parasites et maladies qui restent fortement létaux chez les humains, renseigne toujours cette étude.
Par contre, étant donné le pouvoir de détoxication des composés secondaires du long et large intestin des gorilles et de leur flore intestinale, l’auteur n’arrive pas à savoir si cette capacité peut neutraliser aussi les effets bénéfiques des composés à valeurs thérapeutiques.
Toutefois, l’auteur avance une hypothèse selon laquelle le comportement d’automédication chez les gorilles serait masqué par son comportement interprété comme alimentaire, comme cela a déjà été suggéré pour les gorilles de plaine de l’Ouest par Masi (2012a).
Pour rappel, le comportement d’automédication a été suggéré comme étant un acte volontaire chez nos cousins les plus proches, les chimpanzés, car la consommation régulière à petite dose de certaines plantes avec des bénéfices alimentaires minimes pourrait les aider à maintenir un niveau bas de pathogénicité dans leur organisme (Krief et al., 2006 ; Huffman & Seifu, 1989).
Etant donné que les gorilles partagent certaines maladies avec les humains et que certaines de ces maladies sont très virulentes chez les humains et le sont moins chez les gorilles, la présente recherche pourrait permettre d’améliorer les connaissances sur la résistance de ces animaux aux maladies.
Les résultats du présent travail pourront ainsi enrichir la formulation de recommandations pour les humains afin de pouvoir exploiter ces espèces végétales à plus large spectre dans le traitement de certaines maladies, conclut l’auteur.
Joël MUBAKE